RÉDACTEUR WEB: ESCLAVE 2.0
Sommes-nous complices d’esclavagisme ?
Rédacteur esclave: un peu de provocation pour se demander si nous, les internautes que nous sommes, sans le savoir, nous contribuons à alimenter le nouvel esclavagisme. Il y a, dans beaucoup d’articles que nous lisons sur le web, des petites mains d’esclaves qui ont écrit ces textes qui promeuvent notre prochain week-end en Bretagne ou la description technique de notre futur vélo sur un gros site marchand.
Je vais donc vous parler aujourd’hui du rédacteur esclave 2.0. Je vais vous parler de leur travail et la raison pour laquelle ils méritent notre attention à nous tous, internautes que nous sommes.
Tout comme moi j’imagine, vous naviguez sur des sites web. Que ce soit pour rechercher des renseignements sur votre prochaine destination de vacances, pour vous éclairer sur la façon de faire connaître un gîte touristique ou pour prendre des renseignements sur votre prochain aspirateur-robot. Le lien entre tout ça ? Des pages web, des articles, qu’il aura bien fallu écrire. Car oui, ne croyez pas que les articles apparaissent sur les sites web sans qu’il n’y ait une intervention humaine au préalable.
Cela me vient donc à déduire que les renseignements que je prends chaque jour sur le web, la description produit de mon prochain achat sur Cdiscount ou Amazon, ce ne sont pas des articles : ce sont D’ABORD DES ŒUVRES DE L’ESPRIT.
Ne croyez pas que les propriétaires de sites écrivent 100% de leurs articles. Ne croyez pas qu’à la FNAC, il y ait du petit personnel dans les arrières pour rédiger la description de votre prochain écran plat. Non. Ces sociétés font appel à des « agences de référencement », des « référenceurs », ou directement des « rédacteurs web ». Cela va du gros site e-commerce en passant par le petit site vitrine pour promouvoir l’activité de peintre en bâtiment du quartier.
Car oui, pour qu’un site web soit visité, il faut qu’il ait du contenu DE QUALITÉ. Et ce n’est pas forcément ce peintre en bâtiment qui, le soir après sa compta, va se coltiner un article optimisé de 2500 mots pour apparaître dans les premiers résultats de Google. Car de la même façon que peintre en bâtiment est un métier à part entière, rédiger un article pour le web est également un métier : celui de « Rédacteur web ». Chacun ses compétences. Et si la plus grande partie des sites web sont invisibles aujourd’hui, c’est entre autre parce que le contenu est de mauvaise qualité, quand il n’est pas carrément absent.
Quelle solution pour se faire connaître avec son site web ?
– Premier cas de figure : Continuer à écrire 25 mots pas toujours bien orthographiés et ne respectant aucune règle propre à ce que demandent les moteurs de recherche. (Vous, je ne sais pas, mais moi, lorsque j’arrive sur un site web et qu’il y a des fautes, où je dois relire le paragraphe 3 fois parce que je ne comprends rien, c’est simple, je m’en vais)
Dans ce cas-là, il y a de fortes chances pour qu’au bout de deux ou trois ans, le site web soit abandonné par son propriétaire car il sera invisible. On verra donc ce pauvre peintre se faire dépasser par des concurrents qui eux, ont un site web digne de ce nom.
– Deuxième cas de figure : Il va rechercher la raison pour laquelle son site est invisible. Il va donc faire appel à une « agence de communication », « une agence de référencement » ou un rédacteur web indépendant.
À qui confier la rédaction d’un article ?
Bon. Des rédacteurs web indépendants, c’est comme dans tous les domaines : il y a une petite partie de très bons, ceux qui ont déjà leur clientèle grâce à la qualité de leur travail reconnue de tous. Et il y a tous les autres. Ceux qui sont rédacteur de fin de mois, ceux qui sont rédacteur à défaut d’être commerçant ambulant ou femme de ménage. Ceux qui ont un ordi, qui savent aligner 10 phrases corrigées par leur logiciel et qui ont trouvé là un moyen de se faire quelque menue monnaie. Mais il y a un truc que son ordi n’a pas : le talent. Ce n’est pas parce que vous avez fait une tarte aux fraises mangeable (et tout juste présentable) que vous êtes pâtissier.
Pour revenir à nos moutons et surtout à notre exemple, le peintre, il va être horrifié quand il va voir qu’un article de qualité c’est le prix de 2 pots de peinture de 15 kg. Là, il a 2 solutions : soit il sait que c’est certainement un bon investissement et que son site va gagner en visibilité, soit il va tirer sur les prix. Il faut qu’il sache, quand même, que pour ma part, si j’ai seulement 50€ à consacrer pour faire repeindre mon salon, je risque fort de tomber sur un type qui va me barbouiller mes murs et en mettre partout. Résultat, j’aurai perdu 50 balles, je vais devoir refaire le boulot et en plus, je dirai que les artisans peintre, ils font de la m…
Quelle solution pour faire rédiger son article?
Une autre solution ? Il va faire appel à une agence de communication digne de ce nom. Cette agence va se charger de tout : de revoir, voire de refaire le site web, les photos et de CRÉER UN CONTENU DE QUALITÉ. Ce sont d’abord des communicants, non ? Ces agences, elles peuvent avoir leurs propres rédacteurs, de métier, ou faire appel à des rédacteurs indépendants, de métier eux aussi. Là, la qualité du rendu, le contenu des articles, tout cela sera à la hauteur de la facture. Mais il faut savoir ce que l’on veut. Si j’achète un tee-shirt à 3€, je ne vais pas aller râler parce que personne ne se retourne sur la qualité de ma tenue vestimentaire et qu’il est déformé au bout de 3 lavages. Bref. Mais au final, que va t-il se passer ? Eh bien les moteurs de recherche vont remonter le site dans leurs résultats, le site du peintre va avoir plus de visites et potentiellement plus de clients. Et deux clients plus tard, il a largement amorti son investissement et ce, pour longtemps !
Quand aux agences de référencement, ou référenceurs, c’est un peu différent. Là encore, je n’irais pas jusqu’à dire qu’ils font de la merde, mais c’est comme les melons : il va falloir en tâter plus d’un pour trouver le bon. Le problème, là aussi, c’est qu’on en a une bonne palanquée qui se disent référenceurs mais dans les faits, c’est autre chose. Il est assez facile de mettre sur son site web des logos de grandes entreprises, de soit-disant « références ». Pour ma part, en 10 minutes, je vous insère sur mon site les logos de Carrefour, Total et Sony et je dis que c’est moi qui m’occupe de leur visibilité. Donc, il existe un nombre vraiment considérable de zigotos qui se disent « agences de référencement ». Ils vont même proposer des prix imbattables. 10 ou 20€ les 10 articles, soit disant « optimisés pour les moteurs de recherche ». Ces gens-là, ils sont tellement doués, qu’ils vendraient du sable à un touareg et des santiags à un cul-de-jatte.
Et le problème, c’est que oui, vous allez payer ce prix là ! 20€ les 10 articles ! Je suis pas très bon en math, mais ça doit faire à peu près 2€ l’article. Un article de 1500 mots. C’est à dire 2 pages A4.
Donc, comment font ces « agences de référencement » pour vous proposer des articles à ce prix là ? c’est là que ça se corse… En fait, c’est assez simple. Et je risque de vous choquer si je vous dis que nous sommes tous complices d’esclavage, sans le savoir. Qu’en allant sur le web pour faire nos recherches sur nos prochaines destinations de vacances, ou quand on lit un article sur la santé, voire sur la pauvreté dans le monde, il y a de fortes, et même très fortes chances pour que cet article ait été écrit par des petites mains, souvent bronzées, la plupart du temps en Afrique de l’Ouest ou à Madagascar. Attention, je ne critique nullement les rédacteurs africains et la qualité de leur travail ! Comme en France et partout ailleurs, il y a de bons et même très bons professionnels et des charlatans qui manient le verbe comme moi je pourrais manier un bistouri sur une table d’opération. Non, le problème, c’est le tarif proposé, ou plutôt imposé, aux rédacteurs africains.
10 Euros un article de 1000 mots, c’est de l’esclavagisme
Des agences de référencement en France, en Europe, des blogueurs ou de simples propriétaires de sites web ou sites e-commerce font appel à des rédacteurs sur les réseaux sociaux. Pire encore, des soit-disant rédacteurs ou “agences de rédacteurs” en France ou en Europe (j’ai quelques adresses de sites que je ne publierai pas ici) sont les premiers esclavagistes du web. Sans toujours s’en douter.
Leur méthode ? Elle est très simple. Ils se présentent comme “Rédacteur web” ou “Agence de référencement naturel”.
Ces agences proposent leurs services sur leur site web. Ils promettent à leurs clients (blogueurs, propriétaires de sites web) de créer du contenu (articles de contenu, communiqué de presse). Prestations qu’ils vont facturer 70, 100 ou 250 Euros H.T. à leur client, pour un ou plusieurs articles de 700, 1000 ou 2500 mots. Le client, lui, n’est nullement informé de ce qui se cache derrière cette prestation. L’agence web va donc “sous-traiter”, sans toujours se douter qu’ils font appel à un rédacteur esclave: ses rédacteurs habituels (souvent au Bénin ou à Madagascar) ou à des rédactrices web sur Facebook par exemple.
Incriminer un système
Il n’est pas ici question de pointer du doigt les agences de rédacteurs ou de référencement. La sous-traitance fait partie du système depuis longtemps. Ce qui peut toutefois être contestable, c’est la méthode: tirer les prix vers le bas, pour ne pas dire en sous-sol, jusqu’à 0.005€ le mot (si, si), soit 5€ pour un article de 1000 mots et revendre cet article 80€, c’est là extrêmement immoral. Dans ce cas, il est facile de mettre en avant, sur son site, que l’on peut produire des dizaines d’articles chaque jour ! Cette agence de rédacteur semble oublier qu’écrire un article de 1000 mots sur un sujet que l’on maîtrise peu, c’est parfois deux ou trois heures de navigation sur Internet (sans compter les coupures de réseau GSM ou d’électricité fréquentes en Afrique) et penser, écrire et corriger un article de 1000 mots, c’est largement une heure de travail. Au strict minimum, le rédacteur esclave en Afrique, aura passer 3 heures à écrire un article pour 5€, alors qu’en Europe, il aurait gagné largement 10 fois plus…
Le rédacteur esclave n’a pas le choix
Des milliers, voire des dizaines de milliers de personnes, sur Facebook ou ailleurs, se déclarent “rédacteurs web”. Il y en a. De vrais rédacteurs web, qui font un travail d’un grand professionnalisme. Mais il y a également de simples internautes qui ont faim. Et qui sont prêt à écrire, sur un téléphone mobile, un article de 1500 mots qu’ils revendront 5 Euros à un rédacteur en France. Quand on a faim, on est prêt à cela. Et les agences de référencement, les rédacteurs français le savent bien. Ce sont eux les esclavagistes du web. Ce sont eux les complices de cet esclavagisme du 21ème siècle. EUX LES COUPABLES !
Quelle solution pour ne pas cautionner cet esclavagisme des temps modernes ?
Que ce soit en France, en Belgique, au Bénin ou à Madagascar, écrire un article de contenu pour un site web, c’est d’abord un travail: une oeuvre de l’esprit. Bien que l’on soit tous vigilent sur notre budget, tout travail mérite salaire. Au-dessous de 0.04€ le mot, vous êtes déjà complice d’esclavagisme.
Cet article, écrit par Christophe GRÉGOIRE, comporte 2021 mots. Il a été rédigé en 3h20.
Grand merci à toi. Ces sans vergogne méritent tous d’être dénoncé et toi tu mérites d’être soutenu pour la lutte. En tout cas, moi, je me joins à toi 👊.
Merci beaucoup pour votre soutien ! Il est toujours très très difficile de dénoncer sans diffamer. En tous cas, vu le “salaire” proposé aux rédacteurs, il n’est pas normal de laisser les choses se poursuivre ainsi… Mais vu le peu de retour que j’ai sur cet article (vous êtes le premier), cela doit paraître tout à fait normal pour beaucoup ! Mais à mon sens, ne rien dire, c’est accepter. Et il se trouve que je n’accepte pas que des personnes se fassent exploiter ainsi en 2022…
Je trouve ce site vraiment magnifique. C’est le meilleur, il n’y a pas match.
Merci beaucoup Belvine! Je rougis…
Bravo! Ils faut dénoncer ces malhonnêtes sans vergogne !
Très bel article. Je vous félicite.
Merci Alexia. Je suis en train de préparer un article sur ce sujet plus précisément. Tu pourras le retrouver ici lorsque je l’aurai terminé.